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créôle

  • L'hospitalisation engendre de bien morbide souvenirs

    Je connais un petit cimetière, je ne vous dis que ça !

    Le soir de la toussaint, les autochtones viennent à pied par les routes et les chemins en groupes de trois quatre ou cinq personnes, le soir après la vesprée mais quand à l'horizon grille encore l'ampoule astrale en diffusant une douce luminosité dans les tons oranges.

    Ils portent tous une grosse bougie dans un sac papier et cette procession franchit la petite grille de dentelle forgée et rouillée puis se rassemble doucement, à pas feutrés devant la petite chapelle commune.

    Les femmes, un châle noir sur les épaules ou sur leurs cheveux, parlent à voix basses, les hommes gardent les yeux baissés, mais quelques cris de bambins déchirent inopportunément le silence gras.

    Toutes ces bougies forment un nouvelle lumière, diffuse, qui empêche la nuit de descendre définitivement.

    Quand le dernier villageois a rejoint l’assemblée, ils prient à l’unisson et les marmonnements semblables à des gémissements montent dans le ciel pour atteindre les cieux.

    Les morts commencent à frissonner, le bruit monocorde des tombes qui tremblotent accompagne les psaumes des voix monotones.

    On se sent enveloppé, happé, transporté par ce chant vibrant et qui prend lentement une force sans cesse grandissante pour atteindre à la fin l’acmé perçant  qui fore le ciel pour atteindre les étoiles et les morts qui y reposent.

    Tout s’arrête. C’est la mort qui reprend le cimetière, mais les défunts ont ouï la prière des vivants et peuvent reprendre sereinement leur doux sommeil éternel. On ne les oublie pas.

    Les petites bougies se séparent et pénètrent le cimetière s’éparpillant entre les tombes, chacun, à présent va veiller son parent en toute intimité.

     

     

    Fort de France (Martinique)

    Les trois îlets

    Toussaint 1977