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trafic d'influence

  • Un procès très ordinaire

     

    C’était un 15 décembre.

     

    Dès que je me suis présenté à la réception pour l'entretien d'embauche, j'ai su que ça allait merder !

    La secrétaire avait une tête de chien battu et a totalement paniqué quand je lui ai annoncé que j'avais rendez-vous avec le directeur.

    Elle est restée un bon moment à me regarder comme si je venais pour un hold-up, puis, voyant que je ne bougeais pas d'un poil, elle m'a dit :

    " je vais l'appeler pour lui dire que vous êtes là, alors ?" et c'était plus une question qu'une affirmation.

     

    La secrétaire du directeur est venue me chercher. Elle avait l’air sympa mais quelque peu distante.

    Le directeur, je l’avais déjà eu au téléphone et il m’avait semblé assez limité.

    C’était un homme courtaud avec le cou rentré dans les épaules, des petits yeux chafouins et une barbe en collier de marin breton qui prend d’une oreille jusqu’à l’autre mais en évitant le dessous de la lèvre inférieure et sans moustache, un nain de jardin. Il avait l’air fourbe et retors.

    Il n’était pas seul dans le bureau, une femme mûre à la face rébarbative aux yeux globuleux aux lèvres repoussantes et aux cheveux hirsutes et blanchâtres l’accompagnait.

    Le directeur nous a présentés : Yfig, Madame Obséquieuse, Chef du personnel.

    Nous nous sommes serré la louche, elle avait des mains de maçon, toutes sèches, crevassées, râpeuses.

    Elle a évité soigneusement de me regarder dans les yeux et j’ai trouvé que son nom lui allait à merveille.

    Ils m’ont prié de m’asseoir et l’entretien a commencé.

    Ils m’ont fait le coup du : « nous allons vous présenter notre société », formalité des plus chiantes dans la mesure ou  elle consiste à parler en bien de l’entreprise en évitant soigneusement de dire le moindre mot sur la réalité interne.

    Puis, de la façon la plus classique qui soit, nous nous sommes penchés sur mon CV. J’ai bien essayé d’y mettre un brin de fantaisie, mais ils m’ont vite fait comprendre que l’humour ne les branchaient pas.

    Enfin, on a joué au petit jeu des questions réponses, le truc le plus tartignolle qui se puisse pratiquer pour un entretien d’embauche, sauf si strictement technique.

     

    La question qui tue : «  avez-vous des questions sur l’entreprise ? »

    Ben oui, évidemment face de pet, je voudrais savoir si vous piquez dans la caisse et si vous vous octroyez des avantages surnuméraires ?

     

    Et là, la dame à tête de bouledogue et qui se prétendait chef du personnel a enfin pu poser LA question pour laquelle elle avait insisté pour participer à l’entretien :

    «  Si nous vous retenons pour le poste, pensez-vous que vous devrez être tenu  informé de tout ce qui se passera dans la société, ou bien, au contraire, pensez-vous que vous ne vous sentirez concerné par ce qui se passera dans votre département et uniquement par ça ? »

     

    Ca m’a foutu un coup, car je me suis dit que cette pauvre dinde était vraiment aussi finaude qu’un baril de lessive vide qui peut encore servir comme poubelle et que je me préparais de sacrés beaux jours si jamais je rentrais dans une boîte où le chef du personnel est aussi gland qu’un rayon de roue de bicyclette !!!!!!

     

    J’ai eu une furieuse envie de me lever et de me casser en laissant là ces deux ronds de flanc.

    Mais j’étais sans boulot depuis six mois et n’avais droit à aucun type d’allocation ni d’aide et chaque jour qui passait nous endettait un peu plus ….. et puis, j’ai eu une pensée amicale pour l’ami qui m’avait introduit auprès de cette société.

     

    J’ai donc fait semblant d’avoir pris le temps de réfléchir pour leur asséner benoîtement le seul lieu commun qu’une pareille question pouvait attendre en réponse :

    «  Ni l’un ni l’autre, chère madame (et j’ai perçu, à certaines vibrations, qu’elle serrait les fesses), car si je vous dis que je me contenterai de m’informer de mon département, vous penserez que je me désintéresse de votre entreprise, ce qui n’est pas le cas, et si je vous réponds que je veux être tenu informé par le détails de tout ce qui s’y passe, je n’aurais plus assez de  temps pour m’occuper de mon service. Je souhaiterai donc être mis au courant de tout ce qui me concernera au premier degré et accessoirement de tout ce qui peut avoir une influence sur la stratégie globale de l’entreprise et donc, par effets de bord, sur mon service. L’art du management n’est-il pas d’anticiper ? »

     

    Le directeur acquiesça du chef et parut fort satisfait et elle, fort décontenancée, je le vis à ses yeux qui avaient échappés à ses orbites.

    Elle les remit en place et nous échangeâmes nos civilités.

     

     

     

    Par mon copain qui suivait ce client pour d’autres services, j’appris que nous étions deux sur les rangs. Avouerais-je que j’ai espéré ne pas être retenu ? C’était un peu lâche de ma part, mais qui me jettera la première pierre ?

    Le lendemain, mon copain m’informait que l’autre candidat avait déclaré forfait après son entretien. Tu m’étonnes, pensais-je ! Il est pas fou, lui !

     

    Le 19 décembre, le directeur m’appela pour me tenir informé, sans s’oublier au passage.

    « Je voulais vous dire que nous continuons à recevoir des candidats et que c’est pour cette raison que nous ne vous avons donné aucune suite pour le moment, et je voulais savoir si vous êtes toujours disponible, si nous pouvons compter sur vous ? »

     

    J’ai quand même appelé mon pote pour lui faire part de mon inconfort vis à vis de cette turne inquiétante.

    Il m’a rassuré en termes convaincants :

    « T’inquiète, Yfig, c’est qu’une question de formalités, une fois dans la bergerie, tu feras tout ce que tu voudras, ils sont tous brèles en informatique et tu vas vite t’en rendre compte et tu passeras pour un dieu à leurs yeux ! Et puis oublies pas qu’ils sont à moitié fonctionnaires et qu’ils passent leur temps à roupiller.  »

     

    Lui, au moins, avait la foi !

    «  Et pourquoi tu travailles avec eux si tu en as une si mauvaise opinion. » risquais-je.

    «  Pour le fric mon chéri, pour le fric. »

     

    Bon ! je me remis à ma toile et me concentrais sur un glacis des plus délicat. Dommage que la peinture ne nourrisse pas en dessous d’une certaine notoriété. Si mon copain m’avait introduit dans les milieux artistiques, j’aurais eu plus de grâces à jouer les caudataires.

     

     

    Le 26 décembre, le nain de jardin m’appelait pour me demander si j’accepterais de commencer le 30 décembre en justifiant cette date quelque peu surprenante par un jargon totalement incompréhensible. Il s’agissait de mettre, au plus vite, un terme aux bêtises du responsable de service que je devais remplacer.

     

    Rendez-vous fut donné.

    Le 30, à 9 heures, j’avançais vers ma destinée.

     

    Le directeur me demanda de l’accompagner jusqu’au service informatique.

    C’était une grand messe : tout le personnel de service, y compris les deux personnes en congés, avaient été requises. Au total 12 personnes plus le directeur et votre serviteur nous évitions de justesse le 13 fatidique. La ‘cène’ me sembla particulièrement surréaliste.

    Le directeur en Christ et ses 12 apôtres et moi le témoin inattendu !

    La bouledogue n’était pas là, mais j’apprendrais ultérieurement qu’elle n’était pas spécialement courageuse dans les cas de gros vent.

    Le Christ me présenta en qualité de nouveau chef de service devant l’ancien qui prit rapidement la parole pour affirmer qu’il n’avait pas été officiellement informé ni destitué et qu’en conséquence il restait le seul chef ….. passant outre, le Christ fit le tour de la table en demandant à chacune et chacun de se présenter.

    Ils s’exécutèrent avec des mines crispées et des culs serrés (ça se voyait à leur bouches qui rentraient dans leurs faces).

    L’ambiance de plomb était particulièrement lourde et épineuse.

    On mettrait ça dans un film, pensais-je, personne n’y croirait !

    Puis vint mon tour de présenter mes états de services.

    Je débitais mon CV comme s’il s’agissait du synopsis de ma prochaine nouvelle, avec baroud à Khartoum, ramdam à Djakarta, barnum à Pretoria et missions commandos à Chicago …. A leur bouilles pétrifiées, je me suis mis à la place de mes futures collaboratrices et teurs qui devaient se demander quel était là le mercenaire qui débarquait dans cette petite entreprise paisible qui vivait au rythme des 35 heures et des RTT et n’avait nul besoin d’un kamikaze pour gâcher leur tranquillité.

    Ce n’était pas moi, c’était une espèce de professionnel qui récitait une notice d’emploi.

    Le directeur m’a demandé de présenter mon plan d’action.

    Manquait pas d’air le dirlo ! J’ai répondu que je souhaitais réaliser un travail d’équipe et que je convoquais le personnel à une réunion de définition de stratégie qui se tiendrait à 14 heures 30.

     

    Le Christ est redescendu à son bureau de directeur et je suis resté avec mon prédécesseur qui m’a dit qu’il ne me tenait pas personnellement responsable de la situation mais qu’il ne fallait pas non plus que je m’attende à la moindre faveur de sa part.

     

    J’avais pas faim. Je suis allé faire un tour à pied pour m’aérer les synapses.

    Je faisais tout mon possible pour ne pas penser. La seule chose qui me retenait de tout envoyer chier, c’était de me dire que de commencer un 30 décembre me validait le dernier trimestre pour la retraite et ça, c’était quand même un joli pied de nez au destin. Et puis tout comptes faits, ce n’était jamais qu’un contrat à durée déterminée, de quoi passer une mauvaise passe !

     

    On m’a casé dans un petit bureau au fond du couloir.

     

     

    Ca a duré plus d’un mois, jusqu’à début février quand le directeur et sa marâtre se sont enfin décidés à lourder mon prédécesseur.

    Ils se sont crus aux States, car ils l’ont viré du jour au lendemain sans semonce …….  Mais c’est son histoire, pas la mienne …… ça m’a quand même laissé de quoi largement réfléchir à ce que pourrait être mon sort ……

     

    Et puis je me suis mis à l’ouvrage.

     

    Chaque fois que je constatais un dysfonctionnement, je rédigeais un rapport circonstancié que j’adressais au directeur en lui demandant de me faire part de sa décision.

     

    Exemple :

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    Messageries LOTUS / LINUX  et Base Documentaire LOTUS

    .  Nous avons mis en place une messagerie sous LINUX

      nous avons testé avec succès la possibilité de consulter les bases documentaires de   

    Lotus à partir d’un navigateur WEB.

     

    Nous sommes donc à même de vous proposer deux solutions :

    - Acheter des licences LOTUS pour les nouvelles boîtes de messagerie

    - Donner accès à la messagerie LINUX en garantissant une parfaite communication avec les personnes ayant déjà leur compte sous LOTUS.

    En l’attente de votre décision, et toujours à votre disposition pour toute question ou information complémentaire, veuillez agréer mes plus cordiales salutations.

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    Mes collaboratrices-teurs n’étaient pas du tout des brèles, en tout cas, pas tous.

    Je les ai inscris à des cours, choses qui ne leur était pas arrivé depuis plusieurs années et j’ai fait venir des intervenants experts sur des sujets pointus.

    Au fil des mois, les compétences du service remontaient de niveau et l’ambiance de travail  devenait de plus en plus agréable.

     

    Mais c’était sans compter sur la jalousie de la l’acariâtre pimbêche dont je venais d’apprendre qu’elle se trouvait être DRH par ancienneté et qu’elle avait commencé  comme secrétaire sténodactylo quelques décennies auparavant. Je n’ai rien contre les autodidactes, mais les promotions canapé, par contre, ça me défrise les poils du cul et la différence est aisée à faire entre une professionnelle et une gribouille qui vous fait de vilain procès pour des choses qui la dépasse et qui réinvente le code du travail au gré des ses fantasmes et autres humeurs.

    J’avais eu l’occasion, au travers de quelques altercations simples de me rendre compte de l’incompétence croquignolette de la dame.

    Elle ignorait, entres autres, les modalités juridiques de gestion des fonds de formations et prétendait que les formations que je réclamais pour mon service devaient faire l’objet d’un budget officiel. Je lui fis entendre raison en l’amenant à accepter une réunion avec un prescripteur de formations professionnelles de la place qui lui apporta tous les éléments juridiques qui lui prouvèrent par A plus B que le financement pouvait être assuré indépendamment du budget. J’ai bien senti que mon stratagème ne l’avait pas flattée sur sa capacité à la gestion des ressources humaines.

    Elle avait décrété, d’autre part, qu’avec un CDD, je n’avais pas accès aux avantages du CE. Je m’en foutais, le CE ne proposait rien, rien qui puisse m’intéresser.

    Puis les premiers échos des suites données par mon prédécesseur sont parvenus à nos oreilles et il les avait assignés en prud’hommes pour non respect des procédures de licenciements.

     

    C’est dans le courant du mois d’avril que j’ai été convoqué par le Christ et sa bonne sœur. Nous nous sommes donc retrouvé à trois dans ce huis clos à l’ambiance une nouvelle fois surréaliste et mélodramatique.

    Au début de la conversation, ce n’était pas clair, on me demandait si je n’avais rien à me reprocher ? Je me suis dit qu ‘ils devaient agir de la sorte avec le reste du personnel, convoquer les salariés et les traiter comme des gosses pris la main dans le pot de confiture ….. mais moi, je ne voyais pas du tout où ils voulaient en venir ?

    Je ne devais pas avoir l’attitude qu’ils attendaient d’un subalterne en présence du tribunal d’exception disposé à pardonner les fautes avouées.

    Ce jeu de cons commençait à sérieusement m’agacer et je leur ai demandé si il ne manquait pas un quatrième pour une partie de carte ?

    Ca a eut au moins pour résultat de les secouer au point de m’avouer la faute dont ils attendaient que je m’accuse.

    Vous donnez trop de compétences aux personnes du service informatique !

    Nom de Zeus ! Ils m’auraient demandé en mariage, je n’aurais pas été plus abasourdi !

    Ils ont pris leur pied, car j’étais bouche bée, tétanisé par tant de stupidité infantile. Une mouche, qu’on aurait facilement entendu voler, aurait eu largement le temps de se réfugier au fond de mon gosier.

    Quand je suis sorti de mon coma, j’ai bégayé un truc du genre :

    « Mais c’est exactement ce pour quoi vous m’avez recruté ! Comment pouvez-vous me reprocher ce que toute entreprise attend d’un chef de service ? »

    La réponse était Kafkaïenne :

    « Leur donner un peu de compétence, oui, mais là, c’est trop ! »

    Je voulais encore y croire, ne pas sombrer dans leur délire imbécile.

    «  En quoi cela vous gène-t-il ? »

    J’avais pensé à tout sauf à ça :

    «  S’ils ont trop de compétences, ils vont facilement se revendre sur le marché du travail et nous perdrons des salariés fidèles. »

     

    Tout était incroyable ! Je n’avais pas de mots pour exprimer et mon désarroi et mon incrédulité face à tant d’iniquités.

     

    Et puis j’ai soudainement compris.

    La lourdingue était en train de me faire un numéro de comique.

    Elle n’avait pas apprécié, mais alors pas du tout, mon coup pour lui forcer la main sur le financement des formations et avait dû passer toutes ses nuits à trouver le moyen de briser mes velléités de donner à  mon équipe les connaissances et les compétences qui nous rendraient compétitifs. 

    Elle avait donc manœuvré autour du directeur pour le convaincre du péril que de telles compétences pouvaient faire courir à l’entreprise.

    C’était affligent.

    Mais ayant compris tout ce cinéma, il m’était facile de la renvoyer dans ses buts.

    Très rapidement, j’allais au tableau et je listais les formations demandées, celles réalisées ou en cours et celles à venir.

    Innocemment, je posais la question :

    «  Qu’elles sont, d’après vous, les formations superfétatoires ? »

     

    Ils conclurent soudainement que je devais continuer de veiller à la formation du personnel de mon service, mais sans excès de zèle.

     

    J’avais envie de gerber. J’ai pris ma bagnole et je suis rentré chez moi.

     

    Il y eut bien d’autres péripéties du même acabit, mais je vous en fait grâce.

     

    Et puis, un soir, j’étais resté plus tard qu’à l’habitude elle m’appela et me demanda de la rejoindre dans son bureau. Je m’exécutais, mais avec la même bonne grâce que met un lapin à se jeter dans la gueule du loup.

     

    Elle me remémora qu’elle était mon supérieur direct et qu’elle avait décidé de suivre le service informatique de plus près car, dit elle, je n’étais pas assez proche de mes collaborateurs ni assez directif.  Elle me prévint que, dès le lendemain, elle avait décidé d’organiser une réunion de « remise sur pied » du service.  Je ne pipais mot car je ne souhaitais surtout pas lui donner la satisfaction de rechigner. De toutes façons, depuis l’histoire de la formation, ses manœuvres me laissaient de glace. J’avais un contrat à durée déterminée et je souhaitais juste le mener à son terme avec le moins de tracas possible.

    Au moment de sortir, elle me lança :

    « Vous me préparerez un état des lieux du service, il n’est pas normal que vous ne rendiez jamais de compte à personne ! »

    Je remontais dans mon bureau et luis transmis par e-mail l’ensemble des compte-rendus que j’avais adressés au directeur et qui étaient tous restés sans réponse.  J’en profitais pour lui glisser que si son altesse sérénissime le directeur de mes deux voulait bien préciser ses choix sur les questions restées sans réponse, cela ne pouvait pas nuire à l’entreprise. C’était un peu comme une bigote qui dirait au bon dieu qu’elle ne comprend pas qu’on se tue en Irak !

     

    Le lendemain matin, elle vint comme prévu dans le service, mais elle était moins arrogante, en façade, en tout cas. Elle avait apporté des croissants et nous réunit tous dans la petite salle de conférence du service. Nous étions un peu tassés, mais ça ne pouvait que réchauffer l’ambiance qu’elle brisa rapidement en annonçant à la plus grande surprise de toutes et tous que rien n’allait plus au service informatique et que le laisser-aller entretenu par le responsable nuisait considérablement à l’ensemble de l’entreprise.

    Tout le monde était stupéfait car elle semblait totalement ignorer qu’en fait nous venions de réaliser un certain nombres d’exploits qui, pourtant, étaient relatés (sans zèle, il est vrai) dans mes rapports, rapports qui avaient été repris dans le bulletin d’information de l’entreprise (ce genre de propagande qu’affectionnent tant les petits chef d’entreprise ou les politicards arriérés en imaginant que c’est ce qui est écrit qui compte et non ce qu’ils font !). Nous avions fait passer la société de l’ère de l’informatique de papa à celui du vingt et unième siècle. Nouvelle et ultra puissante machine UNIX, langages L4G, bases de données relationnelles, ADSL, HTML,  JAVA, PHP, et LINUX avec DMZ et fire-wall pour tout ce qui avait trait à l’internet.

    Seulement voilà, je n’avais pas pensé à mettre un tableau d’emploi du temps à l’entrée du service qui aurait permis à chacun de savoir exactement ce qu’il avait à faire et ce que les autres faisaient, elle précisa même qu’on pouvait le faire avec EXCEL, la godiche.

    J’essayais de lui expliquer que cette fonction était remplie par un planning ultra sophistiqué géré sous MS/Project partagé par réseaux entre l’ensemble des personnes du service, mais elle était si fière de sa trouvaille qu’il fut impossible de rien lui dire et la secrétaire fut chargée de cette noble tâche pour le lendemain.

     

    Lorsqu’elle fut reparti vers ses pénates, je calmais tant bien que mal mes collaboratrices et       -teurs qui avaient beaucoup de difficultés à comprendre l’attitude inexplicable de la mégère qui semblait privilégier les méthodes moyenâgeuses.

     

    Je suggérais à la secrétaire d’imprimer les planning et de les punaiser pour le lendemain. Dans un premier temps, je lui avais précisé : dans les toilettes, mais, me méfiant d’une interprétation au pied de la lettre, je rectifiais en affectant à cet emploi le mur au dessus de la photocopieuse.

     

    Une bonne âme devait avoir eu pitié de la gribouille car elle ne se présenta pas le lendemain et je n’entendis plus parler d’elle pendant au moins deux semaines. Je savais depuis le début qu’elle avait des espions dans tous les services qui la renseignaient sur les faits et gestes de tout le monde, mais sur ce coup là, selle s’était foutu seule dans la mouise sans prendre le temps ni  la peine de consulter ses antennes.

     

    Puis les semaines ont passées. Il y eut encore et encore des algarades qui la rendaient de plus en plus agressive à mon encontre jusqu’au jour où elle piqua une crise de nerfs en tête à tête, me reprochant un truc dont je n’ai pas conservé le souvenir. Je me souviens seulement lui avoir dit quelque chose comme : « Allez, je vous laisse, une fois encore croire que vous m’avez coincé, le ridicule ne vous ayant pas encore tuée, je suppose que vous êtes maso pour autant aimer ça ! » et je la quittais effondrée en larmes.

     

    Plus elle m’agressait et plus j’avais envie de l’humilier.

     

    Je finis d’ailleurs pas adresser un courrier recommandé accusé réception au directeur pour lui faire un exposé exhaustif de toutes les extraordinaires bévues commises par  sa thuriféraire de service.

    Ce fut la goutte qui fit déborder le vase ! Mon récit était si fidèle à relater l’incompétence de la drh qui voulait se faire informaticienne qu’il n’était plus possible de prolonger la cohabitation. La décision fut prise rapidement et j’étais mis à pied avant même que le directeur eut fini de lire ma lettre.

    Elle commençait comme ça :

    « Monsieur le nain de jardin, croyez bien que je suis désolé d’en arriver à cette extrémité, mais vous ne sauriez exiger de moi de mener à bien les missions que vous m’avez confiées tout en ayant à subir l’inexpérience, l’incompétence dans la conduite de projet et le management de cadres experts ainsi que les manœuvres dilatoires et diffamantes de Madame l’Obséquieuse qui, sans s’en rendre compte, hélas, prend le parti des intérêts de notre fournisseur contre ceux de l’entreprise. Je veux bien lui accorder le bénéfice du doute et considérer ses actes comme autant de maladresses de bonne foi, seulement les enjeux du projet ne supportent pas les maladresses. »

     

     

    Puis, un quinzaine de jours plus tard, je fus convoqué à un entretien préalable  à mon licenciement. Nous étions fin novembre et je n’avais pas tenu douze mois sur les dix huit de mon engagement.

    Je fus licencié au motif d’avoir mis en cause la sécurité informatique de l’entreprise.

    Ca me faisait penser à la sombre période de l’inquisition qui torturait pour obtenir des aveux sans se soucier de la cohérence des dits aveux. Ainsi, on pouvait voir un aveugle accusé de surveillance, un muet de ragots et un cul-de-jatte de  fuite.

     

     

     

    Le cabinet de l’avocat était clair et bien rangé. Le mobilier assez sobre à l’exception de son bureau ministre qui formait barrage entre lui et son client.

    Lui-même était grand, plus d’un mètre quatre-vingt à mon avis. Le crâne dégarni un visage rond des yeux bleus au regard intelligent.

     

    Je lui ai exposé mon histoire, il a prit des notes et rapidement m’a exposé que compte-tenu que je remplaçais un CDI, il se faisait fort de faire passer mon CDD en CDI.

    « Quels avantages ? » Lui demandais-je

    « Il doit vous payer une indemnité immédiate égale à un mois de salaire pour CDD inapproprié. »

    « Et après ? »

    « Eh bien ! on les poursuit pour rupture abusive et vous pouvez demander une indemnité égale à deux mois de salaires. »

    « Oui, mais avec un CDD il me doivent 6 mois de salaires pour rupture abusive, plus les congés, les primes et une indemnité pour préjudice moral. » Lui rétorquais-je.

    « Oui, évidemment ! »

    Ce qu’il y a de bien avec les avocats, c’est qu’ils ont le sens pratique, si j’avais accepté sa proposition, ça lui rapportait la même chose mais avec bien moins d’efforts.

     

    Puis il m’a demandé de choisir mon mode de facturation de ses services : un montant fixe tout de suite ou un pourcentage sur les sommes que je percevrai ? J’ai opté pour le pourcentage. Il m’a demandé une avance de 600 euros et, après une heure, nous nous sommes quittés.

    Jusqu’à la prochaine fois.

     

    Trois mois plus tard, nous avons été convoqués au tribunal des prud’hommes pour la conciliation.

    La juge, une jeune femme sympathique, m’a demandé si j’étais disposé à une conciliation, je lui ai répondu que oui.

    Elle a posé la même question au jeune avocat de la partie adverse, il a répondu qu’il n’était pas habilité à concilier quoi que ce soit.

    Tout le monde était interloqué et la juge lui a demandé s’il confirmait n’avoir aucune habilité à négocier, ce qu’il a fait, elle lui a alors demandé pourquoi nous étions tous réunis s’il n’avait aucune procuration ?

    Il a comprit sa méprise, mais il était un peu tard. Il a quand même fini par dire qu’il était mandaté mais pour refuser toute conciliation !!!!

    Ca commençait fort !

    Mon avocat m’a dit que ça serait dans les minutes et que les juges prud’homaux n’allaient pas apprécier cette décontraction.

     

    Quatre mois après, nous étions de nouveau confrontés, mais l’avocat du nain de jardin a demandé un report car ses conclusions n’étaient pas prêtes !

    La danse de la saint Glin Glin ne faisait que commencer.

     

    Deux mois plus tard, je retrouvai  mon avocat au tribunal. Il était dans tous ses états et m’a tendu une liasse de feuilles en me disant que l’adversaire venait juste de lui remettre ses conclusions et qu’il allait être obligé de demander un report car il n’avait pas eu le temps de les étudier et qu’elles contenaient des éléments nouveaux et embarrassants.

    J’ai lu les documents en question. Je suis allé le voir et lui ai signalé que les documents, qui étaient des compte-rendus tardifs de mes anciens collaborateurs, je les avais, et qu’en fait je ne les avais pas produits au dossier car je n’étais pas censé les connaître, mais que ces documents étaient pour moi des testimoniaux de ma bonne foi et de ma compétence professionnelle. Ils ne faisaient que corroborer ce que je disais depuis le début, à savoir qu’il n’y avait pas eu ‘faute professionnelle’, mais bien au contraire, un renforcement de la sécurité et de la fiabilité du réseau. Je lui ai donc demandé de ne pas solliciter un renvoi et de plaider selon les termes dont nous avions convenus.

     

    Etes-vous déjà allé au tribunal ?

    Les femmes et hommes de loi sont sur le devant de la scène et animent le spectacle face au juge et ses assesseurs.

    Les quidam sont au fond et n’ont pas le droit d’applaudir même quand le spectacle les ravit.

     

    En début d’audience, le juge appelle les dossiers. Il y a au plus une dizaine de dossiers. Les avocats forment un demi cercle autour du juge et de ses assesseurs et, la plupart du temps, demande le renvoi du dossier pour des raisons diverses et variées :

    Je n’ai pu joindre ma cliente au téléphone.

    Maître Innocent, le représentant de notre adversaire, n’a pu se libérer et je suis d’accord pour un renvoi.

    Ma radio de voiture est en panne, je n’ai donc pu me renseigner sur la météo et je demande une renvoi.

    Je vous trouve très beau et je demande un renvoi …..

     

    Ouaip, Coluche disait (presque) : un renvoi pour un vomis !

     

    N'empêche, ils connaissent par coeur tous les temps de conjugaison du verbe 'renvoyer' !!!

     

    C'est affolant, j'ai entendu le juge dire à mon avocat :

    "renvoi à quinzaine ?"

    et lui

    "Euh ! .... non, nous avons changé d'avis" d'une voix de péteux car je le tenais à la culotte ... non, à la robe (ce pet de dé !)

     

    Le nain de jardin était présent, il est venu me serrer la louche avec une petite moue qui semblait dire : «  on va avoir ta peau, j’ai pris l’avocat le plus cher de la place ! »

     

    Les dossiers importants ou à l’issue incertaine sont passés avant nous.

    Puis vint notre tour. Le tribunal, à part nous, était vide.

    En fait, chaque partie s’est vu accorder généreusement dix minutes montre en main pour plaider en raison du retard pris pour les autres affaires.

     

    L’avocat de la partie adverse, un homme âgé dont on pouvait penser qu’il était expérimenté mais dont le discours démontra qu’il était visiblement peu au fait des techniques informatiques s’est contenter de m’insulter en affirmant qu’il suffisait de jeter un coup d’œil à mon CV pour voir à qui on avait à faire : un « monsieur je sais tout » ! Puis il m’a accusé d’avoir, pendant mon travail, été consulter des sites pornos !

    J’étais assis, j’ai fait un bond sur mon cul !

    Lui et le nain de jardin arboraient un sourire flamboyant.

    Je me trémoussais en levant la main comme un écolier bien sage, mais ayant un besoin urgent … le juge a fini par me donner la parole et j’ai demandé de quels sites il s’agissait ?

    Le troglodyte à robe noire comme ses idées m’a répondu sèchement : « nous avons ici la liste, il s’agit de sites ‘point org’ ! » Et il s’est retourné vers le juge avec une espèce de fierté magnifique d’avoir cloué au pilori le vicieux que j’étais sensé être.

    J’étais époustouflé, sans voix, et l’avocat s’est empressé de me donner le coup de grâce en précisant : « org comme orgasme ».

    Mon avocat m’a regardé interloqué, les yeux exorbités et l’air accusateur de ne l’avoir pas mis au courant de mes déviances sexuelles.

    J’ai enfin pu sortir trois mots : « Mais non, ‘org’, c’est pour ‘organisation’, ce sont les sites gouvernementaux officiels que j’avais à consulter pour m’informer des règles des marchés publics ».

    Mon avocat est parti d’un grand rire sonore et le tribunal est devenu le siège d’une gigantesque rigolade.

    Il n’y avait que le nain et son avocat pour ne pas se marrer !!!!!!

     

    Avant que nous soyons sortis du tribunal, l’adversaire a annoncé qu’il ferait appel.

    Il avait vraiment confiance en lui-même et en la justice !

     

    Nous avons attendu un mois le délibéré de la cour qui a définit que j’avais gagné et que nos contradicteurs devaient me payer une rondelette somme et que cette décision était de par le code du travail exécutoire. Mon avocat me fit part de ses craintes de me voir toucher une telle somme, car si l’appel ne nous était pas favorable et que j’aie dépensé ces sous, je risquais de me retrouver dans une situation des plus périlleuses s’il me fallait rembourser. Puis, il m’envoya sa facture de 500 euros pour frais supplémentaires. Les avocats prennent le plus grand soin de leurs clients. Je ne peux m’empêcher de penser aux fourmis éleveuses de pucerons.

     

     

    L’avocat du nain a réussit à surseoir au paiement en prouvant que les articles du code du travail n’étaient pas cohérents entre eux et donc inapplicables pour  ce qui concernait l’exécution de la décision des prud’hommes. Mon avocat m’a affirmé mordicus qu’il ne pouvait rien faire.

    Si l’aspect technique vous intéresse :

    L’appel est suspensif sauf en droit du travail si le délibéré est fondé sur l’article L 122-3-8 conformément à l’art R.516-37 alinéa 3 de ce même code  (indemnités correspondant à des salaires non  perçus).  Manque de pot, il n’y a pas d’alinéas dans l’art R.516-37 et c’est ce qui a empêché l’exécution du jugement des prud’hommes.

     

    J’ai écrit au ministre de la justice qui m’a répondu un an plus tard que ma demande avait été transmise à la chancellerie …….  Affaire à suivre ………  mais visiblement, il n’y a pas le feu au lac !

     

    Mon avocat a écrit au Président de la Cour d’Appel pour lui signaler que j’allais me trouver lésé du fait que le jugement ne pouvait être exécuté et lui a demandé de bien vouloir nous accorder une date d’audience rapprochée. Il nous a donné rendez-vous dans huit mois, et mon avocat semblait fier de lui d’avoir ainsi écourté l’attente d’au moins une année ! En conséquence de quoi, il m’envoya sa facture de 500 euros pour frais supplémentaires.

     

     

    Les hommes de loi n’ont pas la même notion du temps que les hommes ordinaires.

     

    J’en ai profité pour refouiller mes archives et j’ai retrouvé un document signé de la DRH-sténo-dactylo qui prouvait que mes dires étaient vrais. J’ai confié l’original à l’avocat qui surprit, m’a demandé pourquoi je ne lui avais pas donné avant ?

    « Mais, cher Maître, c’était dans mes pièces dès le début, mais vous m’aviez, à l’époque, affirmé que je ne risquais pas d’être inquiété sur ce sujet qui était totalement en dehors des motifs écrits du licenciement ! »

     

    Huit mois plus tard (comme on disait dans les films muets)

    Evidemment, lorsque je suis arrivé au tribunal, mon avocat m’a prit le bras pour m’entraîner dans le couloir et me dire qu’il y aurait certainement report car l’avocat de l’adversaire ne pouvait assister à l’audience.

     

    « N’y a-t-il aucune autre alternative ? » lui ai-je demandé.

    « On peut déposer. » m’a-t-il répondu.

    « Ce qui signifie ? »

    « On dépose nos conclusions par écrit et le juge nous convoque pour une plaidoirie seulement s’il l’estime nécessaire, sinon, il délibère sur les écrits. »

    Et j’ai dit « OK, déposons ».

     

    La justice se compose d’individus en apparence différents, mais si on gratte un peu, on s’aperçoit que, sous le vernis, il existe une grande connivence entre ces personnes. Pas une connivence malveillante, non, plutôt une grande intelligence à tirer le meilleur parti financier possible de la détresse des pauvres hères qui n’ont d’autre choix que les solliciter.

    Molière est mort depuis belle-lurette (à ce qu’on m’a dit) mais les pratiques qu’il dénonce dans ses pièces, sont, elles, plus vivantes que jamais.

    Haro sur moi diront ces gens du  huitième art …..  celui des plaideurs,  mais croyez-moi, ayez donc la curiosité de regarder sous leurs robes et vous verrez qu’on distingue très nettement les traces de leurs accointances.

     

     

    Trois semaines plus tard, j’étais convoqué par le juge pour répondre à « quelques questions » ( ? ) J’ai demandé à mon avocat d’obtenir des précisions sur les questions en question, mais il m’a renvoyé dans mes buts en m’affirmant que le juge ne pouvait être dérangé pour rien  (Je suppose que je suis le ‘rien’ en question   -   que de questions …..  sans réponses !!!)

     

    Le juge en question avait un look très spécial. Il avait des cheveux longs, frisés-bouclés, gris et blanc ou poivre et sel  coiffés en pétard ce qui, rien que ça, lui donnait un air hirsute et illuminé, mais de surcroît, il bégayait et ça, c’était assez irrésistible.

    Une avocate du barreau parisien (ça se voyait car elle n’avait pas l’hermine) fut prise au dépourvu et quand il lui demanda :

    « A a a alors, ve ve ve vous pplai pplai pplaidez ou ou papas ? »

    Elle ne put s’empêcher de glousser et se retira et se retourna pour cacher son hilarité et sa honte de ne pouvoir se retenir.

    Le juge, très magnanime, la rasséréna :

    « Ve ve vous inquié tétez papas j’ai l’ha l’ha l’habi tude ? »

     

     

    Enfin vint mon tour.

    Il m’a posé 3 questions sans importance, puis il m’a demandé ce qu’avait voulu dire, dans son compte-rendu à la page 2 paragraphe 5,  mon ex collègue ?

    On a relu le passage en question ensemble et j’ai dit qu’il avait dû se fourvoyer dans les dates car il se contredisait.

    Le juge a insisté et je n’ai rien trouvé de mieux à répondre que : « Il faudrait lui demander »

     

    Boum, badaboum ! Il les a convoqués Deux semaines plus tard mais l’un d’eux ne pouvant venir pour cause de congés, ça a repoussé le tout à quatre semaines plus tard !

     

    Tout le monde sans exception était là pour l’audition des témoins.

    Ils confirmèrent que j’étais un bon chef et que j’avais servi aux mieux les intérêts de l’entreprise et mon ex collaborateurs leva le quiproquo sur la date en confirmant que c’était bien moi qui avait raison.

     

    A la sortie, nous allâmes prendre un pot ensemble.

     

    Mon avocat m’appela pour me dire qu’en raison des faits nouveaux, il y aurait plaidoirie en fin de compte dans trois semaines et il m’envoya sa facture de 500 euros pour frais.

     

    Le jour dit à l’heure dite, j’étais au tribunal.

    La première chose que mon avocat me dit fut que l’adversaire allait demander un report en raison de difficultés techniques. Je lui répondis que c’était hors de question. Il parut embêté.

     

    Le nain de jardin n’était pas là, seul son avocat était présent.

     

    Il n’était que 14 heures. A 15 heures 30, j’eus une envie de pisser et je cherchais les lieux d’aisance …..au détour d’un couloir,  j’entendis la voix de mon avocat qui parlait à voix basse.

    « Mais il ne veut rien savoir, il faudrait un élément nouveau qui fasse qu’on puisse le convaincre de reporter ! »

    et je reconnu la voix de l’avocat du nain de jardin qui lui répondit :

    «  Je vais appeler mon client et lui demander de trouver quelque chose …. »

    Je fis demi-tour sur la pointe des pieds en évitant de me faire remarquer malgré ma démarche 'envie de pisser'.

    Il était 16 heures 30 lorsque l’avocat du nain est apparu avec des documents à la main. Bizarre, il s’adressa à moi au lieu de passer par mon avocat qui avait disparu comme par miracle.

    « Ce sont des pièces nouvelles qui remettent tout en question car ces pièces prouvent que votre service avait un budget suffisant pour acheter de nouvelles licences. » En me mettant les documents dans les mains.

    Je jetais un œil et il se défila …..

    C’était complètement bidon, des documents que je n’avais jamais vu et qui de toute évidence venaient d’avoir été conçus dans l’unique but de me déstabiliser.

    Tiens, mon avocat qui revient !

    « Maître machin vous a remis des documents qui remettent tout en question ? »

    « Non, ce sont des faux, un gamin s’en rendrait compte, et je compte faire un scandale devant le juge si ces documents sont présentés car ce serait une insulte à magistrat, on ne peut impunément se moquer de la justice !! » au fur et à mesure, j’avais élevé le ton et j’étais presqu’en train de crier !

    « Ouf, bon ben tant mieux ! » et il disparut de nouveau.

     

     

    Quand il revint, il me dit :

     

    « Maître machin refuse de plaider ! »

    « Ah bon ! Pourquoi ? »

    «   !   »

    « Et nous ? »

    « Mais nous plaidons, bien entendu ! »  Quel angélisme, pensais-je.

     

     

    En fin de compte, maître machin plaida, mais son discours fut si confus, si embrouillé et bafouillé que l’issue ne faisait aucun doute.

     

    En sortant de la salle d’audience, il vint vers moi et me dit :

    « On se reverra en Cassation. »

    Mon avocat lui répondit :

    « Non, je ne crois pas, le juge va rédiger ses conclusions au plus près et ne vous laissera aucune chance. »

     

    C’est encore à moi que maître machin s’adressa :

    « Nous savons que vous allez gagner, et maintenant ça a moins d’importance si je discute un peu avec vous. Je brûle de vous poser cette question depuis longtemps :               que pensez-vous de votre ancien employeur, parce que moi, j’ai été stupéfait de leur attitude paniquarde, ils semblaient incapables de m’apporter le moindre élément qui me permettent de défendre leur dossier et ont catégoriquement refusé d’assister à l’audience d’aujourd’hui. »

     

    « Vous savez, maître, ils vous mentent, tout comme au tribunal, depuis le premier jour, je leur avais proposé de négocier et d’éviter ce vilain procès, mais ils sont trop stupides pour imaginer qu’ils pourraient ne  pas faire avaler leurs mensonges à la cour et ils se croient protégés par les institutions, ils se croient au dessus de la loi. »

     

    « Oui, je pense comme vous, mais je compte sur votre discrétion ! »

     

    « J’ai pas envie que vous me fassiez un procès ! »

     

    Ca le fit rigoler puis il m’avoua :

    « Vous savez, votre avocat et moi, on se connaît bien. »

     

    L’histoire pourrait s’arrêter là, mais encore fallait-il récupérer l’argent si durement gagné !

    Hors, le nain riait jaune d’avoir perdu et chercha le meilleur moyen de n’honorer sa dette que contraint et forcé dans les délais les plus longs possible afin, une dernière fois, de bien m’emmerder !

    Les sommes gagnées, ne sont en effet pas versées directement au particulier, mais à son avocat qui lui, les dépose sur un compte spécial : la CARPA (Caisse autonome des règlements pécuniaires des avocats), pour une raison obscure, pendant une durée de 21 jours.

     

    Demain, je saurais si je dois faire appel à un huissier, ce qui retarderait de plus d’un mois le versement des sommes.

    Ainsi, mon avocat n’ayant pas sollicité l’adversaire dès le jugement et lui ayant gracieusement et à mes frais accordé un délai de plus d’un mois, le nain jubilatoire a tout fait pour que je perde encore 3 mois (dans le meilleur des cas) avant que je puisse jouir de ma victoire et surtout de mes sous.

    FIN

    J’ai écrit ‘FIN’ un peu hâtivement !

     C'est plutôt : A suivre ..........................................